La coccinelle
Par hasard en levant le nez, j'ai aperçu une petite tache rouge
contre l'une des poutres du grenier. M'en approchant, j'ai alorsdistingué trois coccinelles agrippées contre le bois, immobiles,comme mortes. En fait, elles hibernent.
Dès que la luminosité devient inférieure à douze heures, nos
belles coccinelles se regroupent dans un trou d'arbre, une fente de rocher, un grenier. Ces colonies peuvent parfois atteindre
plusieurs centaines d'individus qui, oubliant le froid et la pénurie d'aliments, vivent au ralenti, consommant lentement l'eau et les
corps gras emmagasinés durant l'été. (...)
Il existe plusieurs espèces de coccinelles mais celle à sept points
sur fond rouge-orange est la plus connue. Sept, chiffre sacré, qui lui valut le droit d'être appelée "bête à bon Dieu", et cela depuis
le Moyen-Age.
Sortant de la jungle végétale comme un jouet mécanique
fraîchement repeint, la coccinelle se lance à l'assaut d'une longue
tige de graminée. Sous son corps en forme de bol renversé, trois
paires de courtes pattes s'activent avec rapidité et la propulsent à une allure dont on ne la croirait pas capable. Elle grimpe, grimpe,
tourne autour de la tige qu'elle scrute grâce à ses yeux à facettes,
puis elle la tâte au moyen de ses brèves antennes. Qu'elle est belle,
luisante sous le soleil !
Pas étonnant que l'homme l'ait toujours considérée avec tendresse,
avant même de savoir qu'elle était utile. Utile pour l'agriculteur et
pour les fleurs qu'elle débarrasse de leurs pucerons dont elle est la pire ennemie. Elle en dévore sans répit plusieurs centaines par jour.
Manger des pucerons est une chose mais il faut aussi penser à sa descendance. Chez nous, notre dame à sept points ne se reproduit
qu'une fois par an. La période des amours intervient en mai. Pour s'accoupler, les mâles volettent au-dessus de la femelle avant de se
poser à ses côtés et de monter sur son dos... un exploit sur cette
carapace luisante, glissante et bombée !
La femelle commence sa ponte une ou deux semaines plus tard.
Elle peut déposer jusqu'à mille oeufs durant son existence, à raison
de cinquante par jour. Cette ponte est tributaire de la richesse en pucerons que recèlent les plantes environnantes. Les larves naissent
quatre jours plus tard environ. Comme maman, elles sont féroces et dévorent aussi les malheureux
pucerons. Voraces, elles grandissent rapidement.
Elles passent par quatre phases de croissance, soit quatre mues en
dix-huit jours. Bien qu'aveugle, la larve est capable de repérer les pucerons et en dévore jusqu'à cent par jour. Elle se transforme
ensuite en nymphe et huit jours plus tard, elle devient coccinelle... Une coccinelle jaune sans points. Mais au bout de quelques heures,
les élytres deviennent orange puis rouges et les points, les sept points
sacrés, apparaissent progressivement. Fin août déjà, la coccinelle
prépare son hibernation qui la mènera jusqu'au mois d'avril. Encore quatre mois de sommeil ! (...)
P. C. (Extrait de presse)